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| Sujet: l'ennui scolaire : Lun 30 Jan - 2:16 | |
| L’ennui scolaire selon les élèves : une cause essentielle de décrochage La réflexion proposée ici repose, entre autres, sur des entretiens non directifs conduits par Gilbert Longhi avec 475 jeunes de 15 à 21 ans[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien][5], tous candidats à une reprise de scolarité après une période de dormance, de décrochage, ou d’exclusion. Leur point commun : ils se sont tous très ennuyés en classe[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien][6]. Les causes Les élèves évoquent trois causes principales de leur sentiment d’ennui. D’abord l’égalitarisme discriminant. Leur dégoût de l’école résulte de la sélection implacable qui s’y joue, et que veut masquer l’orientation (71 %). Les jeunes reprochent à l’ascenseur scolaire de limiter l’élévation des élèves aux visées de la machine. Par exemple, aucun collégien ne voit comme un progrès une affectation en seconde professionnelle, expliquant qu’un avenir d’ouvrier ou d’employé ne constitue jamais une success-story. La découverte de la discrimination à l’école est facteur de démoralisation (54 %). Deuxième cause : l’expertise aléatoire des professeurs. Leur pédagogie, leur jugement, leur notation sont déterminants[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien][7], mais sont-ils fiables ? Aujourd’hui, ils font redoubler 50 % des élèves au moins une fois durant leur scolarité, mais leurs critères restent flous et aucune étude n’atteste de l’efficacité du redoublement. 87 % des jeunes interrogés évoquent des ratés en ce domaine. Enfin, si les élèves ne contestent pas le respect dû au corps enseignant, 57 % regrettent que les professeurs ne soient pas tous justes. Ils ont parfois dû subir des maîtres insuffisants, mais que l’omerta de leurs collègues et la passivité de l’administration protégeaient. En même temps, 89 % critiquent l’organisation de l’enseignement : carte scolaire autoritaire, options imposées, débouchés incertains, hiérarchisation des filières, concurrence entre établissements. Les symptômes Les élèves qui s’ennuient évoquent majoritairement (67 %) un temps béni où « l’école ne les saoulait pas » ; 17 % mentionnent même un ancien statut de bon élève. Avant de reconnaître qu’ils s’ennuient, les élèves s’installent dans la dénégation (67 %). L’identification de la gravité du phénomène intervient au fur et à mesure de l’érosion de l’appétence scolaire. D’abord, la durée des cours devient interminable (76 %). Puis la situation devient intenable (95 %) : hostilité des professeurs, mauvaises notes... Enfin, les relations avec les parents se détériorent (74 %), sachant que, dans certaines familles (18 %), le mauvais élève est considéré comme un mauvais fils ou une mauvaise fille. Mais malgré l’ennui, 77 % des élèves apprécient toujours la collectivité scolaire, pour sa convivialité irremplaçable (72 %). Et 46 % décrivent même un attrait pour les connaissances gratuites en dehors de toutes notes. A partir des témoignages, on peut définir quatre paliers d’ennui. Le premier est une résistance. L’élève tient bon même si le cœur n’y est plus : auto-défense passive. Il dissimule son inappétence et sauve les apparences. Les enseignants l’accusent de ne pas travailler assez et de craindre l’effort. Les parents pensent généralement qu’il suffirait d’un peu de bonne volonté et d’un peu plus d’engagement pour se sortir d’une mauvaise passe passagère. Au second palier, on recourt à des palliatifs : bavardages, jeux de classe, baladeur, graffitis de pupitres, SMS, etc. permettent de subir sans faillir. Les enseignants allèguent la démotivation, la paresse, l’incivilité, ou la provocation, ils sanctionnent, en soulignant le risque de ne jamais pouvoir rattraper le temps perdu. Les parents blâment, mais ne dramatisent pas encore. Au troisième palier, l’élève cumule les absences, et met en scène une tromperie générale, anti-sèches, plagiats, triches en tous genres,… Le dégoût des études s’enracine. Les professeurs se déclarent souvent impuissants à traiter de tels comportements autrement que par des sanctions, parlent de redoublement, de réorientation. Les parents désavouent l’adolescent, mais ils demandent à l’école de ne pas compromettre son avenir par une exclusion. Le quatrième palier est une descente aux enfers. L’élève est ouvertement absentéiste ; lors de ses rares moments de passage dans l’établissement, les conflits sont fréquents. Il ne tient plus à justifier son statut d’élève par des subterfuges. L’évaluation est impossible en raison du faible nombre de travaux rendus. La démission ou l’exclusion en conseil de discipline sont les seules issues possibles, mais leur menace n’impressionne pas l’élève. Les enseignants manifestent à la fois déception, pour n’avoir pas pu retenir l’élève, et satisfaction, parce que force reste à l’autorité. Les parents, qui découvrent alors la conduite de leur enfant et la déplorent, regrettent que l’école ne l’ait pas retenu en mettant en place une prévention efficace. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] |
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