Ils vont en guerre
On entendait parler par-ci par-là
C’était le quotidien du voisinage
La guerre qui faisait peur la voilà
Elle pompe ses forces dans tout le village
Jeunes gens pleins d’orgueil volontaires
Forts curieux pour la plupart d’entre eux
Ceux qui n’ont jamais quitté leurs terres
Voulaient découvrir d’autres cieux
Leurs parents qui sont plus âgés
Connaissent bien cette briseuse de rêve
Le triste la peur atteignaient leur apogée
Le courbé ne se redresse ni se relève
On leur donne une tenue bien jolie
Si seulement le sang ne laisse pas de trace
La pluie la boue le soleil ramolli
Son tissu et perd ainsi sa face
Une foule embarquait sous le regard
De leurs proches qui attendaient sur le quai
La guerre les attendait quelque part
le bateau qui les prendrait les attendait
Ils sont en guerre
Ils sont réveillés par des sirènes
Qui déchirent ce calme retrouvé
Les vautours en acier se promènent
Cela devrait sûrement leur arriver
le partisan de la guerre se lève
Et crie en avant braves et fiers
C’est ainsi qu’on voit tout rêve
S’envoler comme les grains de poussière
Ils avancent leurs pas dans la boue
Et enjambent les premiers déjà morts
Ils se demandent s’ils arriveraient au bout
Où les accueillerait-il leur sort
le casque leur tombe sur les yeux
Ils ne sont pas encore en âge de le porter
Ils portent gauchement leurs vieux
Fusils et leurs cœurs de peur battaient
En ce mois d’hiver le ciel gris
En cette nuit glaciale tout est noir
les soldats en pleurant ont pris
leur courage ont laissé leur espoir
On ne voit rien sauf quand la foudre
S’abat elle illumine ceux qui gisent
l’odeur du sang et celui de la poudre
Mélangées soulevées par la brise
Ils courraient tous en avant
Mais personne ne voyait la haie
leurs corps sont couverts de sang
Mais on ne voyait aucune plaie
Quand l’un d’entre eux tombe
leurs jambes refusent de les porter
On lui creuse aussitôt une tombe
Une vie vient de s’arrêter
Ils reviennent de guerre
les paysans aux faux tondaient le champ
Sous un soleil de plomb qu’ils oubliaient
le sifflement du bateau déchirait le temps
Arrivait aux cœurs qui toujours priaient
les gens joyeux accouraient de partout
les autres basculaient les bras sur les toits
Vers le port ils couraient comme des fous
Longtemps qu’ils avaient gardé leur foi
Un petit enfant criait « je les ai vus
Ils sont là ils sont arrivés par la mer »
Un vieux a répliqué « nous t’avons cru
Ce sont nos enfants ils reviennent de la guerre »
Il y avait une vaste foule dans le port
Ils regardaient le bateau qui accostait
Il nous faisait voir son tribord
S’approchait lentement du vieux quai
Il y avait autant de monde que de joie
Chacun cherchait voir le sien
A leur descente ils ont perdu la voix
Tout est triste on ne comprenait rien
Les revenants étaient peu en nombre
Pourtant plusieurs étaient partis
Amertume tristesse dévoilaient le sombre
D’un regard bref le ciel devenait gris
C’était des jeunes à la fleur de l’âge
C’était des jeunes à la fleur de vie
Certains ont même perdu l’usage
De leurs mains l’ambition et l’envi
Les larmes aux yeux les bras s’ouvraient
Pour ceux qui ont rejoint les leurs
Pour ceux qui ont vu la mort de près
Pour ceux noyés dans les pleurs
Une vieille a pris l’un d’eux par l’épaule
« Dis-moi où tu as laissé mon enfant »
Son silence l’a rendue encore folle
Le silence qui triturait les fin-fonds