La Suisse a-t-elle besoin de centrales nucléaires – et si oui, de combien?
Cinq centrales nucléaires sont actuellement exploitées en Suisse: Beznau I et
Beznau II dans le canton d’Argovie, Mühleberg dans le canton de Berne et les deux
installations – plus grandes – de Gösgen dans la région de Soleure et de Leibstadt
en Argovie. En raison des prescriptions légales, ces centrales nucléaires doivent cesser de
fonctionner entre 2020 et 2045. C’est pourquoi la planification de nouvelles centrales
nucléaires bat son plein. Trois demandes de permis de construire ont été déposées et les
discussions enflammées entre opposants et partisans de l’énergie nucléaire ont débuté
avec véhémence.
Pour rappel: les Suissesses et les Suisses ont déjà posé les jalons de la politique énergétique il y a des années lors de deux votations populaires très controversées. Le 23 septembre 1990, le peuple et les cantons ont rejeté de façon plutôt juste l’initiative populaire
«Pour un abandon progressif de l’énergie atomique» avec 52,9% de voix négatives. En
même temps, l’initiative populaire sur le moratoire «Halte à la construction de centrales
nucléaires» a été nettement acceptée par le peuple et les cantons par 54,4%. Le même
jour, le peuple et les cantons ont aussi approuvé le nouvel article constitutionnel sur l’énergie avec 71,1% de voix.
Le 18 mai 2003, deux projets de politique énergétique ont été nettement rejetés par
le peuple et les cantons: l’initiative populaire «Moratoire-plus – Pour la prolongation du
moratoire dans la construction de centrales nucléaires et la limitation du risque nucléaire»
avec 58,4% de voix négatives et l’initiative populaire «Sortir du nucléaire – Pour un tournant dans le domaine de l’énergie et pour la désaffectation progressive des centrales nucléaires» avec 66,3% de voix contre. Le peuple a ainsi laissé ouverte l’option de l’énergie
nucléaire.
Pour le Conseil fédéral et la branche de l’énergie, la situation est claire: ils considè-
rent la construction de nouvelles centrales nucléaires comme absolument nécessaire. Les
politiciens de l’environnement sont en revanche d’un tout autre avis et critiquent les propositions du Conseil fédéral en matière d’efficacité énergétique et
d’énergies renouvelables pour leur «manque de courage». Ils placent tous leurs espoirs dans un avenir vert avec des énergies renouvelables encouragées par l’État et grâce à la taxe sur le CO2 sur les
combustibles et les carburants fossiles.
Il est certain que le potentiel de l’énergie alternative est encore loin d’être épuisé et que beaucoup d’électricité pourrait toujours être économisée. Quant à savoir si le besoin en électricité du
futur peut et doit être couvert sans centrales nucléaires, il s’agit là
aussi d’une question de foi. Tandis que les partisans de l’énergie nucléaire n’interviennent
pas seulement en faveur de l’«énergie la plus propre», mais considèrent même le problème
du stockage final des déchets nucléaires comme résolu, les opposants voient justement
dans les déchets à haute radioactivité un problème pour l’humanité.
La question de savoir si la Suisse a besoin de centrales nucléaire et, si oui, de combien, préoccupera et divisera la population sur le plan émotionnel encore pendant longtemps. Il est certain que l’électricité doit être économisée et l’énergie alternative intensivement favorisée dans tous les domaines. En cas de consommation énergétique
pratiquement excessive, la politique ne pourra guère éviter d’autoriser la construction de
nouvelles centrales nucléaires. Le temps écoulé depuis le moratoire a malheureusement
été bien trop peu utilisé pour favoriser, en Suisse, des alternatives à l’énergie nucléaire
sur une large base. H E I N Z E C K E RT, R É D A C T E U R E N C HE F
É D I T O R I A L S O M M A I R E
TEXTE:2
Pour et contre le nucléaire
L’utilisation de l’énergie nucléaire pour la production d’électricité donne lieu à de longues controverses (discussions) entre les partisans du nucléaire et ses opposants.
Ses partisans soutiennent que l’électricité produite par des réacteurs nucléaires revient moins chère que celle des centrales alimentées au charbon, au pétrole ou au gaz. Ils pensent que cette alternative est venue à point pour remplacer ces énergies qui font défaut. L’énergie nucléaire, ajoutent ses défenseurs, trouve, en outre, de nombreuses applications avantageuses dans l’industrie, la médecine et l’agriculture. Ils affirment qu’elle est indispensable au progrès et à l’indépendance énergétique. Aussi, qualifient-ils de réactionnaires leurs détracteurs. Car refuser le nucléaire, estiment-ils, c’est refuser le progrès et la modernité.
Par ailleurs, les «pro nucléaires» partagent l’argument selon lequel : l’énergie nucléaire est une arme de dissuasion qui permettra peut-être d’éviter une troisième guerre mondiale.
Pourtant, rétorquent leurs adversaires, cette énergie n’est pas sans danger. Le nucléaire, répliquent-ils, comporte beaucoup plus d’inconvénients que d’avantages. Ses risques de radioactivité sont inévitables en cas d’accident nucléaire, parce que c’est une technique qui demeure insuffisamment maîtrisée. L’accident de Tchernobyl en est une preuve édifiante. Le nucléaire reste donc très dangereux pour toute vie humaine, animale et végétale, puisque, insistent-ils, jusqu’à maintenant, les scientifiques n’ont pas trouvé le moyen le plus sûr d’éliminer les centaines de tonnes de déchets atomiques des quelques réacteurs en service. Dans certaines régions, ces déchets ont provoqué de véritables désastres écologiques. Les opposants réfutent également la thèse économique. Selon eux, les installations nucléaires sont beaucoup plus coûteuses. Enfin, ils contestent le prétendu pouvoir de dissuasion de l’arme atomique. Ils jugent, au contraire, irresponsable qu’un individu (chef d’Etat) puisse avoir le pouvoir de décider de la vie de millions d’êtres humains. La tragédie d’Hiroshima, cinquante ans après, continue d’avoir des conséquences douloureuses sur les habitants de cette ville martyre. Il devient plus grave encore lorsque, dans quelques années, la fabrication d’une bombe atomique sera à la portée d’un scientifique moyen. Ce qui multipliera davantage les risques quand on imagine ce que pourrait en faire un groupe de terroristes.
C’est pour ces raisons que les «antinucléaires» sont résolument convaincus de la nécessité de renoncer à cette énergie mortelle.
"Certes, l’énergie nucléaire ouvre des perspectives intéressantes de recherches scientifiques, mais le danger permanent qu’elle pèse sur l’humanité est énorme.
Il existe, néanmoins, d’autres sources d’énergie qu’il faudrait, peut-être, mieux explorer; telle l’énergie solaire qui ne comporte aucune menace contre l’homme et son environnement."
TEXTE:3
L'automobile
L'automobile a pris dans le monde du XXe siècle une place privilégiée. C'est l'objet roi ; On voit en clic l'invention qui a le plus bouleversé notre monde. C'est une véritable religion moderne qui a ses
fervents, ses adorateurs, ses circuits, son langage, ses lois. Elle inspire aussi toute une littérature et occupe une place de choix dans les filins. Mais que nous apporte-t-elle ?...
Essayons de voir d'abord, dans un plaidoyer objectif, les avantages de cette invention. Elle a d'abord apporté un élément d'aventure dans notre vie ; avec elle on part vers l'inconnu, dans une entreprise que l'on sait comporter des risques. Elle sert aussi le désir du jeu, depuis les compétitions qui drainent vers le Mans ou Monaco des milliers de fanatiques, jusqu'au triomphe de celui qui annonce qu'il a augmenté sa moyenne horaire. De plus, elle fait connaître à beaucoup de conducteurs la joie de la vitesse. Enfin et peut-être surtout, elle nous donne une liberté irremplaçable : voyages entrepris quand on le souhaite, possibilité de s'arrêter, de visiter quand on le veut... La voiture est donc assimilée à un animal docile, elle nous sert, on lui parle, on l'entretient, moderne coursier d'une époque où la machine a remplacé la bête.
Cependant, il faut bien reconnaître que cette invention a de très nombreux inconvénients : le goût du gaspillage, le développement de la paresse, de l'égoïsme et de l'agressivité. Elle dégrade la vie urbaine et devient la pire des contraintes. Enfin et surtout, les hommes se conduisent avec leur voiture comme avec un jouet, mais en fait c'est leur vie et celle des autres qu'ils jouent souvent, par inconscience et imprudence. Elle se transforme alors en un engin de mort. La voiture automobile a donc fait perdre à beaucoup d'hommes la notion des valeurs essentielles, dignité, respect d'autrui, dès qu'ils s'installent derrière un volant.
En définitive, tout ce que l'automobile apporte de confort, de liberté, de rêve, ne va-t-il pas s'effacer devant le pouvoir de destruction qui s'affirme de jour en jour à mesure que l'on va vers une saturation ?
L'homme, comme pour toute forme de progrès, sera-t-il assez raisonnable pour utiliser avec intelligence ce moyen de locomotion, ou finira-t-il par devenir son esclave ?
Revue « Progrès et Croissance »
TEXTE:4
Pour et contre le progrès
Personne, assurément, ne songe à nier de nos jours, les bienfaits que le progrès de la science et de la technique a provoqués. En effet, les connaissances se sont étendues bien au delà de ce que l'on aurait osé naguère encore rêver: l'économie a pris un essor vertigineux; les conditions de vie se sont considérablement améliorées; bien des souffrances peuvent à présent être soulagées et bien des maladies guéries; la mort elle même a, en quelque sorte, reculé.
Cependant on ne croit plus à présent que la science est capable de tout expliquer ou qu'elle puisse, par elle même assurer, d'une façon générale le bonheur des hommes. D'autre part, on fait aussi remarquer que ses bienfaits ne servent pas tous et qu'ils n'existent tout compte fait, que pour une minorité de gens, groupés à peu prés uniquement dans les pays "développés" d'Europe et d'Amérique. Enfin, certains critiques vont plus loin encore. La science d'après eux , entraînerait plus de méfaits que de bienfaits et les arguments qu'ils invoquent ne laissent pas d'être impressionnants: les effets terrifiants des armes scientifiques les plus récentes et le risque de destruction qu'elles font peser sur l'humanité; l'ampleur des pollutions résultant du développement technique et les dommages irréversibles qu'elles infligent à l'environnement; le rythme inhumain imposé à la vie dans le cadre de la "société de consommation" dont l'avènement est lié à l'essor de l'économie et donc au progrès scientifique.
La seule réponse que nous pouvons faire à des accusations aussi graves est évidemment, que la science ne doit pas être tenue pour responsable de toutes les conséquences qu'on en tire. Elle n'est qu'un instrument. Son utilité ou sa nocivité dépendent en réalité de l'homme lui-même, des buts qu'il lui propose, de l'usage qu'il en fait.
Extrait de la revue : L'HISTOIRE CONTEMPORAINE. Ed. Hachette.