Janvier 1957 – la bataille d’Alger
Le 07 Janvier, 8000 parachutistes entrent dans la ville. Ils sont commandés par le Général Massu, à qui Robert Lacoste, ministre résident en Algérie, vient de confier les pleins pouvoirs. La 10ème DP (division parachutiste) reçoit la mission de « pacifier » Alger où la tension est extrême entre les communautés. Les militaires français veulent porter un coup décisif aux indépendantistes algériens. Les négociations secrètes qui se déroulaient à Belgrade ou à Rome durant l’été 1956 ont été rompues et, du coup, le gouvernement de Guy Mollet cherche le bras de fer. De leur côté, les dirigeants du FLN avaient décidé de concentrer les opérations sur Alger lors du congrès de 1956, qui s’était tenu dans la vallée de la Soummam, en Kabylie. Ils savent que le « bruit » à Alger peut avoir un impact considérable.
Mais la réponse que va leur opposer l’état français est violente. La réplique à l’entrée de l’armée dans la ville ce sont les attentats contre les européens causant des dizaines de victimes. Début février, les explosions au stade municipal d’Alger et au stade d’El Biar font 10 morts et 34 blessés, en juin, l’attentat au casino de la Corniche tue 8 personnes et en blesse une centaine. Le 26 janvier, des bombes avaient explosées dans trois cafés de la ville faisant plusieurs morts et blessés. Le FLN lance alors un mot d’ordre de grève générale pour le 28 janvier.
Les paras cassent la grève en forçant les boutiques à rouvrir. Et puis les hommes de Massu procèdent à des arrestations massives quadrillant la ville, les quartiers « arabes » sont bouclés. Et, en utilisant les fichiers de la police, les paras interpellent des suspects par centaines avant de les regrouper dans des centres de triage qui vont devenir de véritables centres de torture …
L’express n° 2896 du 04 au 10/01/2007
Texte 2
[size=18]La torture pendant la guerre d'Algérie (1954-1962)
Le rôle de l'armée française hier et aujourd'hui
L'armée française a systématiquement pratiqué l'assassinat et la torture sur ses adversaires. Un débat public à ce sujet est en cours en France depuis des mois. En novembre dernier, deux hauts responsables militaires français à la retraite ont révélé au quotidien Le Monde qu'ils avaient, torturé, maltraité et assassiné des membres du FLN (Front de libération nationale), le mouvement de libération algérien de l'époque, entre 1954 et 1962 lors de la guerre d'Algérie.
Le général Jacques Massu, 92 ans, qui était en 1957 le chef des tristement célèbres "paras" (10e division de parachutistes) et son bras droit le général Paul Aussaresses, 82 ans, chargé des services de renseignement à Alger, ont confirmé que plus de 3 000 prisonniers qui avaient à l'époque été portés "disparus", avaient en réalité été exécutés. Aussaresses a reconnu la réalité, en 1957, de la torture et des exécutions sommaires dans les pratiques de la politique de guerre française. Il s'est vanté d'avoir employé des moyens qui sortaient des normes établies par les lois de la guerre ainsi que d'avoir ordonné à ses subordonnés de tuer. Il reconnait avoir lui-même procédé à 24 exécutions sommaires de membres du FLN. Et il ajouta " ne pas avoir à se repentir ".
Le débat sur la torture fut relancé par la publication dans Le Monde du témoignage d'une ancienne victime de la torture: Louisette Ighil Ahgiz, une jeune militante de 20 ans à l'époque, qui était tombée en septembre 1957 entre les mains des tortionnaires, et qui souffre aujourd'hui encore, à l'âge de 64 ans, des séquelles physiques et psychiques de la torture. Elle avait été capturée après être tombée avec son commando FLN dans une embuscade du général Massu. Elle avait été emmenée, grièvement blessée, à son quartier général. Là, elle fut sévèrement torturée, sans relâche, trois mois durant. Louisette précisa comment Massu ou bien le général Bigeard, quand ils venaient la voir, l'insultaient et l'humiliaient avant de donner l'ordre par gestes de la torturer. "C'est comme s'il existait un code muet établi" ajouta-t-elle. Elle ne doit sa survie qu'à un médecin militaire qui la découvrit fin décembre 1957. Il la fit transporter dans un hôpital où elle échappa à ses tortionnaires. C'est cet homme qu'elle voulait retrouver au moyen de son récit dans Le Monde pour pouvoir lui dire merci.
Le récit de Louisette Ighil Ahgiz fut à l'origine d'un flot de courriers de lecteurs et d'articles dans de nombreux médias français. Un autre ancien combattant du FLN, Noui M'Hidi Abdelkader, qui avait été lui-même arrêté à Paris en 1958 et incarcéré et torturé à Versailles, confirme par exemple que la torture avait également été pratiquée dans la capitale. Il est convaincu que les archives, qui n'ont toujours pas été ouvertes, recèlent les déclarations de milliers de victimes de la torture.
Par Marianne Arens et Françoise Thull[/size]